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Retour sur le Meeting du FOMC de juillet 2023 : La Réserve Fédérale américaine poursuit l’augmentation de son taux d’intérêt de référence

Siège à Washington D.C. de la Réserve Fédérale, la Banque centrale américaine



Jerome Powell, Président de la Réserve Fédérale américaine | Photo : Reuters

Le 26 juillet 2023, la Federal Reserve (la Banque centrale fédérale américaine), a procédé à une augmentation de son taux d’intérêt de référence de 0,25 point de pourcentage en passant son « Federal Funds rate » de 5,25 % à 5,5 % (qui est une fourchette dans laquelle la Federal Reserve fait varier son taux d’intérêt de référence (voir les graphiques ci-dessous Federal Funds Effective Rate (%), Federal Funds Target Range - Limite supérieure (%), Federal Funds Target Range - Limite inférieure (%) et Federal Funds Effective Rate (%) )). Il s’agit de la plus forte augmentation effectuée sur ces 22 dernières années par le comité de la politique monétaire, le Federal Open Market Committe (FOMC) et le président de la Banque fédérale américaine, Jerome Powell après une courte pause dans la hausse des Federal Funds rate en juin 2023. Lors du meeting de ce 26 juillet 2023, Jerome Powell s’est refusé à dire si lors du prochain meeting de la Fed en septembre 2023, il y aurait une nouvelle augmentation du Federal Funds rate. Il a conditionné une hausse, un maintien ou une baisse des taux à l’évolution des données économiques des États-Unis car selon lui, les prochaines décisions du comité de la politique monétaire de la Fed devront être prises en fonction des données économiques du pays.


Federal Funds Effective Rate (%)

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Federal Funds Effective Rate(%), Federal Funds Target Range - Limite supérieure (%), Federal Funds Target Range - Limite inférieure (%)

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Cette stratégie d’augmentation progressive des taux d’intérêt directeurs semble payer car la croissance des prix aux États-Unis, à savoir l’inflation a selon toute vraisemblance ralentie. Le taux d’inflation qui au mois de janvier 2023 était de 6,4 % a atteint les 3 % au mois de juin 2023 soit une baisse de 3,4 points sur 6 mois, ce qui n’avait pas été le cas de janvier 2022 à juin 2022 où l’inflation avait augmenté de 1,6 point en passant de 7,5 % en janvier à 9,1 % en juin de la même année. L’année 2022 a été l’année où le taux d’inflation annuel a atteint sa plus haute valeur durant cette dernière décennie, à savoir 8,0 % contrairement à l’année précédente en 2021 où le taux d’inflation annuel était de 4,7 % soit moitié moins. Le taux d’inflation avait commencé à augmenter lors de la reprise de l’activité économique après la crise Covid car les consommateurs essayaient de rattraper une partie de leur demande reportée. En ayant vu cette augmentation de la demande, les entreprises ont augmenté un peu plus leurs prix sans perdre de clients. L’augmentation du taux d’inflation était dû aussi à la guerre en Ukraine qui depuis février 2022 avait fait augmenter les prix de nombreuses matières premières (pétrole, gaz, huile, blé…). En juillet 2023, le taux d’inflation a augmenté légèrement pour atteindre 3,2 % et contrairement aux augmentations précédentes de la croissance des prix, il s’agit ici d’un effet de base de l’inflation américaine liées à la souplesse des données en juillet 2022 (le niveau qui sert de référence à l’inflation est particulièrement bas) par exemple l’inflation américaine a été mécaniquement élevée en 2021 parce que les prix se situaient à un niveau plus faible qu’en 2020 et l’éclatement de la pandémie en mars 2020 a fait dégringoler les cours du pétrole. Au début de l’année 2021, ces cours ont retrouvé leur niveau d’avant la crise, ce qui a automatiquement entrainé une inflation énergétique importante, phénomène que l’on appelle alors « l’effet de base » de l’inflation. L’inflation sous-jacente qui exclut les composantes volatiles telles que l’énergie et l’alimentation a elle aussi augmenté de 0,2% en passant d’une inflation annuelle de 4,8 % en juin 2023 à 4,7 % en juillet 2023. Elle reste obstinément élevée, poussant la banque centrale américaine à maintenir ses taux d’intérêt à des niveaux plus élevés plus longtemps. D’après le Financial Times, les services et le coût du logement alimentent toujours l’inflation tandis que les prix de l’énergie et les tarifs des compagnies aériennes continuent de baisser. Toujours selon le journal d’information financière, les coûts du logement ont été le principal contributeur au chiffre global mensuel, représentant plus de 90 % de l’augmentation de l’inflation en juillet 2023. Mais les prix des logements et les loyers ont dans l’ensemble baisser ces derniers mois. En effet, l’indice des prix à la consommation (IPC) accuse un retard d’environ un an sur les loyers du marché qui devrait pousser l’IPC pour le logement à se modérer sensiblement pendant le reste de cette année d’après certains économistes américains.  De plus, la baisse des exportations ukrainiennes a réduite l’offre sur les marchés, poussant à la hausse les prix des matières premières produites en Ukraine et obligeant de nombreux pays à réorganiser leurs approvisionnements au vu des sanctions imposées à la Russie, ce qui a été un procédé couteux faisant de facto augmenter les prix.

Taux d’inflation annuel U.S. (%)

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Taux d’inflation annuel U.S. (%)

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Du côté de la croissance, la hausse du Federal Funds rate ne semble pas pousser le taux de croissance de l’économie américaine à baisser fortement et donc à augmenter la probabilité d’une récession. En effet, il reste en partie constant depuis le deuxième trimestre 2022. Pour les deux premiers trimestres 2023 les États-Unis ont obtenu respectivement un taux de croissance de 1,8 % et de 2,6 %.

PIB réel  U.S. annuel (variation en pourcentage par rapport au premier trimestre de l'année précédente)

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PIB réel U.S. annuel (variation en pourcentage par rapport à la période précédente, non désaisonnalisé)

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De même, la désinflation dû à la hausse des taux d’intérêts directeurs ne semble pas avoir eu d’effet négatif sur l’emploi, en effet le niveau de l’emploi aux États-Unis ne cesse de croître en partant de 133 258 emplois créés en avril 2020 (niveau le plus bas depuis avril 1999) à 161,262 emplois créés en juillet 2023.

Cette baisse des taux d’intérêts de la Fed a aussi eu un impact sur les marchés financiers. En effet, les rendements des bons du Trésor américains et le prix des actions américaines ont largement baissé le 26 juillet 2023. Mais à l’annonce le 10 août 2023 de l’augmentation de l’inflation pour le mois de juillet 2023, les marchés se sont retrouvés à la hausse. Le S&P 500 a clôturé légèrement en hausse après avoir augmenté de 1,3 % dans la journée du 10 août, le Nasdaq Composite a quant à lui gagné 0,1%. Le rendement des obligations du Trésor américain à deux ans (qui évolue en fonction des taux d’intérêt directeurs de la Banque centrale américaine) a atteint les 4,84 %.

Les actions américaines sont actuellement plus chères que celles de tout autre pays ou région, selon les données de Research Affiliates. L’indice de référence des actions américaines se négocie à un multiple d’environ 31 soit plus cher qu’il ne l’a été la plupart du temps depuis 1881. La cherté des actions américaines semble aussi perdurer et montrer que les investisseurs sont optimistes quant à la trajectoire que prend l’inflation aux États-Unis et aux chances de la Federal Reserve et d’autres banques centrales de réguler l’économie de leurs pays respectifs. Effectivement, les futures sur les taux d’intérêt indiquent que les investisseurs pensent qu’il n’y a un peu plus de 30 % de chance que la Fed n’augmente encore ses taux d’intérêt cette fin d’année selon des données du Chicago Mercantile Exchange (CME). Même les stratégistes économistes de la banque d’investissement américaine JP Morgan, sont prêts à parier que la politique monétaire restrictive de la Reserve Fédérale américaine va atténuer la hausse du prix des actions.

Ce qui reste paradoxale c’est que la hausse du Federal Funds rate n’impacte pas négativement la consommation des citoyens américains. En effet, ils continuent de dépenser en partie parce que les investissements en espèces offrent les taux les plus élevés depuis 2001 compensant la hausse des frais d’intérêt. La valeur nette des ménages américains a rebondi pour atteindre 141 000 milliards de dollars au premier trimestre 2023 dû à l’assouplissement monétaire de la Fed qui a aidé nombre d’américains à réduire leur endettement pendant la pandémie leur permettant de se refinancer ou de contracter des emprunts à faible taux. Ceci est dû aussi aux salaires qui augmentent avec des ménages américains bénéficiant toujours de l’argent du plan de relance Covid-19. Les ménages paient 151 milliards de dollars de plus chaque année en paiement d’intérêts sur les prêts hypothécaires et autres prêts. Mais ils gagnent  121 milliards de dollars de plus grâce à leurs investissements.

 

Finalement, lors meeting de septembre prochain, le président de la Federal Reserve, Jerome Powell, devrait selon toute vraisemblance maintenir le Federal Fund Rate à 5,5 % et ce jusqu’à l’année prochaine. Selon les projections économiques du Federal Open Market Committe (FOMC) concernant le Federal Funds Rate, le taux de référence devrait passer de 5,6 % en 2023 à 4,6 % en 2024 et à 3,4 % en 2025 (voir graphique ci dessous). 

Résumé du FOMC des projections économiques concernant le taux des fonds fédéraux ( en pourcentage)

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Le taux d’inflation baissant progressivement au fil des mois pour se rapprocher de la cible d’inflation de 2 % de la Fed, la banque centrale américaine sera donc dans l’obligation de ralentir l’augmentation de ses taux d’intérêt sur le moyen long terme. Peut être aura t-on un premier indice sur la hausse ou non des taux d’intérêt lors du symposium de Jackson Hole se déroulant du 24 août au 26 août 2023 et où se retrouve les leaders des principales banque centrale de part le monde (Bank of Japan, Federal Reserve, European Central Bank, Bank of England,…) mais aussi des ministres des finances, des acteurs de la finance de marché et des académiciens pour échanger sur les enjeux économiques, monétaires et financiers internationaux.